Une modélisation affinée des catastrophes aide les gestionnaires du risque à contrôler leur risque
Les pertes liées aux catastrophes naturelles continuent de croître principalement en raison des effets des changements climatiques.[1]
La saison 2020 des ouragans dans l’Atlantique, qui a battu tous les records avec 30 tempêtes nommées, dont 12 ont atteint les côtes, a contribué à des pertes assurées de 97 milliards de dollars à l’échelle mondiale, soit 40 % de plus que la moyenne depuis 2000. Les cyclones tropicaux et les inondations continuent d’être responsables, dans l’ensemble, de la plus grande partie des pertes économiques mondiales causées par les catastrophes naturelles.[2]
L’incertitude croissante ainsi que l’augmentation de la fréquence et de la gravité des catastrophes météorologiques au cours des 20 dernières années mettent de nombreuses entreprises à l’épreuve, alors que les gestionnaires de risques sont contraints de se préparer à un accroissement des risques catastrophiques et d'en tenir compte dans leur stratégie de gestion du risque.
La saison 2020 des ouragans dans l'Atlantique a contribué à des pertes assurées de 97 milliards de dollars à l’échelle mondiale.
Compte tenu de l’augmentation des sinistres catastrophiques et des pertes au cours des 25 dernières années, l’analyse financière des sinistres catastrophiques, connue sous le nom de modélisation des catastrophes, prend de plus en plus d’importance. Les assureurs et les réassureurs ont recours à la modélisation des catastrophes principalement pour évaluer et gérer le risque lié à divers types de catastrophes, allant des ouragans et inondations aux tremblements de terre et aux feux de forêt. La modélisation des catastrophes a fait d’énormes progrès au cours des 25 dernières années. Des algorithmes plus complexes et de nouveaux ensembles de données ont permis de modéliser des risques supplémentaires, tandis qu’une puissance de calcul accrue permet une modélisation plus précise à plus haute résolution.
Fonctionnement de la modélisation des catastrophes
Les modèles sont créés par des équipes interdisciplinaires réunissant des professionnels qui travaillent ensemble à la création de logiciels, de données et d’algorithmes qui servent à simuler l’impact potentiel que les catastrophes peuvent avoir dans des circonstances précises. La conception de modèles sophistiqués peut être complexe et devoir faire intervenir des experts de diverses disciplines techniques, y compris des météorologues, des sismologues, des géologues, des ingénieurs, des mathématiciens, des actuaires, des scientifiques et des statisticiens. Les modèles font également appel à des données sur les polices et à de l’information financière provenant des assureurs et des réassureurs, y compris les valeurs des couvertures, les franchises, les montants de garantie et d’autres renseignements liés aux polices, afin de créer un profil de la probabilité de sinistres pour différents scénarios d’événement dépassant un certain niveau ou d’autres paramètres.[3]
Pour les assureurs et les réassureurs, les analyses par modélisation des catastrophes peuvent englober un vaste territoire (p. ex., États, régions, pays) pour les aider à prendre des décisions essentielles en matière de risques touchant leur volume d’affaires. Grâce aux résultats que permettent d’obtenir les modèles, les souscripteurs disposent d’une meilleure méthode d’analyse et d’évaluation du niveau global de capital qui pourrait être nécessaire pour payer d’éventuelles réclamations et potentiellement répartir le capital entre les divers risques faisant partie de leur portefeuille.[4] Les modèles peuvent également faciliter la prise de décisions sur le plan de la tarification, de l’appétit des entreprises et de la capacité de mieux définir les décisions en matière de réassurance.
La modélisation des catastrophes fonctionne également à petite échelle. Les plus grandes préoccupations des gestionnaires de risque sont l’inconnu ou les événements inattendus, que l’on peut difficilement prévoir ou évaluer à l’avance. Les gestionnaires de risques qui cherchent à réduire le risque doivent être conscients de la possibilité de pertes liées à des catastrophes dans leur région, par exemple, des ouragans et des inondations dans les régions côtières du sud-est et de l’est, et des tremblements de terre sur la côte du Pacifique. C’est pourquoi de nombreux gestionnaires de risques travaillent avec leurs courtiers pour contrôler l’inconnu et qu’ils se concentrent sur le renforcement de la résistance aux risques. Même si les catastrophes naturelles sont source de volatilité dans de nombreux secteurs commerciaux, il est possible de les gérer et de mieux tenir compte de l’inconnu grâce à des données et à des analyses fondées en partie sur la modélisation des catastrophes.
Les plus grandes préoccupations des gestionnaires de risque sont l’inconnu et les événements inattendus
que l'on ne peut pas prévoir ou évaluer à l’avance.
De plus, alors que les changements climatiques s’intensifient, l’exactitude de leur incidence dans la modélisation des catastrophes devient critique. Les facteurs liés aux changements climatiques peuvent se superposer à l’analyse fondée sur la modélisation des catastrophes pour aider les gestionnaires de risques à obtenir une estimation plus précise des sinistres. Les modèles de catastrophes aident également les gestionnaires de risques à prévoir leur intervention en cas d’incident et à atténuer les pertes en invitant le plus rapidement possible des experts en sinistres à se rendre sur place.
À l’aide des données de modélisation qu’ils reçoivent, les gestionnaires de risques peuvent prendre des décisions importantes au sujet de leur cadre de gestion des risques, notamment le recours à des captives d’assurance ou à des assurances paramétriques, lesquelles les aident de plus en plus à repenser leur accès au capital en offrant une solution de gestion du risque qui complète leur programme traditionnel de transfert de risques, en y ajoutant résilience et capacité. Par exemple, une assurance paramétrique peut viser des expositions précises et devenir payable lorsqu’un événement déclencheur survient.
Voici un aperçu plus approfondi de la modélisation des ouragans/inondations et des tremblements de terre.
Modélisation des tempêtes de vent et des inondations
En 2020, quatre ouragans étaient sur la liste des 10 plus importants sinistres assurés à l’échelle mondiale, et deux se classaient parmi les trois premiers. En outre, trois inondations ont figuré sur la liste des 10 plus importantes pertes économiques mondiales de 2020, et les inondations saisonnières en Chine occupaient le premier rang.[5]
Les modèles d’ouragan ont pris de l’importance à la suite d’événements majeurs comme l’ouragan Katrina en 2005. Soulignons cependant que les premières modélisations présentées à la Florida Commission on Hurricane Loss Projection Methodology ont été faites du milieu jusqu’à la fin des années 1990, après l’ouragan Andrew en 1992.
L’incidence des changements climatiques sur la fréquence et la gravité des tempêtes nommées a aussi eu pour effet d’accroître l’importance d’une modélisation exacte pour les assureurs, les réassureurs et les gestionnaires de risques qui sont exposés (p. ex., propriétés assurées) par leur présence dans des régions touchées par des ouragans. Les améliorations apportées à la modélisation des tempêtes de vent et des inondations au fil du temps ont permis de mieux appréhender le risque. L’éventail des risques s’est également élargi et permet de mieux percevoir l’exposition. Les modèles peuvent maintenant fournir des estimations des sinistres liés aux inondations à l’intérieur des terres et sur les côtes et ont également facilité la corrélation entre les pertes liées aux ouragans et celles liées aux inondations, puisque les deux expositions sont souvent reliées. La capacité d’établir des liens entre de multiples risques est essentielle pour obtenir une estimation exacte des sinistres assurés.
Le gestionnaire de risque réussit mieux à préciser l’estimation des pertes pour une propriété en particulier en tenant compte de l’état du terrain, de l’impact du vent, des particularités du bâtiment et d’autres caractéristiques propres à la région ou à la propriété. Une modélisation améliorée tient également compte des particularités des bâtiments, y compris le nombre d’étages et les caractéristiques de construction, et permet aux gestionnaires de risque de mieux comprendre et de préciser l’estimation des pertes pour différents types de risques.
En travaillant avec un courtier, les gestionnaires de risque peuvent souvent utiliser les données et les analyses obtenues par la modélisation des catastrophes pour repenser leur accès au capital. Ils peuvent, par exemple, examiner les options actuelles de transfert du risque – conserver le risque dans leur bilan, le transférer vers le marché traditionnel de l’assurance (ou de la réassurance) ou trouver de nouvelles structures, comme des options d’assurances captives ou d’assurance paramétrique.
Modélisation des tremblements de terre
Il n’y a pas si longtemps, les assureurs faisaient le suivi de l’exposition au risque de tremblement de terre en plaçant des punaises sur une carte. Le monde des affaires dynamique d’aujourd’hui exige une approche beaucoup plus perfectionnée en matière de modélisation des tremblements de terre, qui est devenue plus sophistiquée et détaillée au cours des dernières années.
Même si les progrès de la technologie de modélisation des catastrophes ont permis aux assureurs et aux réassureurs d’obtenir un aperçu plus précis de l’exposition au risque de tremblement de terre en fonction des estimations des pertes dans les zones sujettes aux tremblements de terre, les gestionnaires de risques peuvent également collaborer avec leurs courtiers pour mieux comprendre l’exposition aux risques et les estimations des pertes propres aux sites, en fonction de l’état du sol, du type de construction et d’autres caractéristiques régionales ou propres à la propriété.
L’activité sismique ne présente pas d’importantes fluctuations annuelles et les conditions météorologiques n’ont pas d’incidence directe sur les tremblements de terre, mais la probabilité que ceux-ci se produisent dans des régions qui y sont sujettes est une préoccupation majeure pour les entreprises qui y sont établies.[6]
Il est pratiquement impossible de savoir précisément où se produiront les prochaines « grosses secousses ». Les modèles adoptent plutôt une approche stochastique du risque, en recourant à la science pour appuyer les décisions fondées sur les données. Ils tiennent compte d’un large éventail de scénarios possibles afin d’aider les gestionnaires de risques à comprendre où les pertes peuvent se produire, ainsi que l’ampleur et la fréquence des répercussions financières liées aux pertes potentielles en cas de tremblement de terre. L’utilisation de meilleures données est essentielle pour que les gestionnaires de risques comprennent l’exposition au risque de leur organisation et prennent des décisions plus éclairées en matière de transfert du risque, notamment le recours à des captives d’assurance ou à des assurances paramétriques.
Il est pratiquement impossible de savoir précisément où se produiront les prochaines « grosses secousses ».
En travaillant avec leur courtier pour effectuer une modélisation des catastrophes et en prenant part à d’autres analyses ou discussions financières, les gestionnaires de risques sont également mieux placés pour affiner les estimations de pertes pour une propriété en particulier, ce qui permettra à l’entreprise de bien comprendre les emplacements sujets aux tremblements de terre, la planification de la construction, le coût de l’assurance et d’autres facteurs de gestion des risques potentiellement pertinents.
Toutes ces ressources sont en anglais :
[1] USGS. What are some of the signs of climate change?
[2][4][5] Weather, Climate & Catastrophe Insight. 2020 Annual Report
[3] III. Catastrophe modeling: A vital tool in the risk management box